|
Résumé :
|
De toutes les institutions qui existaient dans le monde occidental en 1520, il n’en reste aujourd’hui que quatre-vingt-cinq : l’Église catholique, les Parlements de l’île de Man, d’Islande et de Grande-Bretagne, plusieurs cantons suisses et quelque soixante-dix universités. Cette observation illustre l’enracinement historique de l’institution universitaire. Berceau de l’autonomie de la pensée, creuset d’idées, agent de sécularisation, elle est, depuis la fondation des premières universités, à Bologne et à Paris, au xiie siècle, aux sources de la civilisation occidentale. Relais de la diffusion du savoir dans l’Europe du Moyen Âge, grâce à la lingua franca de l’époque, le latin, grâce aussi à la circulation des professeurs et étudiants, l’université était un des acteurs majeurs de la première construction politique de l’Europe. Ce n’est que plus tard, à partir du xixe siècle et sur un modèle d’organisation bien différent, que l’institution universitaire s’est retrouvée associée à la formation des États-nations du Vieux Continent, accompagnant leurs entreprises coloniales dans le Nouveau Monde ou dans l’Ancien, en Asie et en Afrique, souvent derrière la croix des Jésuites ou des missionnaires américains. Des pays que l’Europe n’a jamais colonisés, comme le Japon ou l’Éthiopie, et même la Chine, pourtant forte d’une tradition académique propre, ont emprunté sans beaucoup d’altérations le modèle occidental. À l’inverse, il est arrivé à l’université de se trouver en décalage par rapport aux grandes ruptures du monde occidental, comme la Renaissance, les Lumières ou la Révolution industrielle, et marginalisée, alors, dans la fonction de production du savoir et de l’innovation…
|