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Résumé :
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Le 10 mai 2006, pour la première fois, la France métropolitaine a organisé une journée nationale de la mémoire de l’esclavage et de la mémoire de l’abolition. Ce choix est intervenu à une période où le thème de la colonisation refaisait surface, et après la création, en novembre 2005, du Conseil représentatif des associations noires (CRAN). Il ressort de cette conjonction que le retour sur le temps de l’esclavage est d’abord motivé par le sentiment des discriminations subies actuellement par de nombreuses personnes de couleur installées en France. Par le recours à l’histoire, et en particulier à l’histoire coloniale, est dénoncée l’inégalité des chances qui frappe des Français noirs par rapport à leurs concitoyens blancs aux mêmes niveaux de qualification qu’eux. Dans cette quête d’une égalité de traitement, et pour que celle-ci reste la priorité, les plus militants sont soucieux de focaliser l’attention sur la situation des personnes, et non sur un événement historique. D’où leur insistance à substituer au discours de la commémoration le « faire mémoire » des femmes et des hommes asservis dont l’humanité a été niée et qui, sans interruption de génération, sont les aïeux des femmes et des hommes victimes de discriminations dans la société française.’émancipation de 1848 représenterait alors essentiellement l’amorce d’un long processus pour acquérir le plein exercice des droits inhérents à la citoyenneté française. Pour ceux qui se reconnaissent une ascendance réduite autrefois en esclavage, l’affranchissement constituerait donc une lutte à poursuivre, la possibilité de relever la tête dans un environnement social défavorable et de revendiquer pour ses propres enfants un avenir meilleur.Une telle relecture de l’histoire de l’esclavage et de son abolition par la France met en évidence le marché de dupes qui s’est tramé à la veille de l’affranchissement des esclaves. Les conditions imposées aux futurs affranchis pour jouir de la liberté n’allaient pas favoriser leur autonomie. Ils resteront – et pour longtemps – privés, en particulier, d’une indépendance économique : « Libres vous serez, mais nus ! »
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